Un extrait du livre Le zénith nacré

Le voici, le voilà! Mon petit dernier est prêt à prendre son envol. *.*

C’est drôle, parce qu’en ce moment cette phrase est à double sens, avec mon plus jeune qui entre à la maternelle alors que je me prépare à publier mon 9e livre. Je vois vos yeux s’arrondir derrière vos écrans. Oui, 9! Cet exploit est en partie grâce à vous, chers lecteurs, chères lectrices, car vos retours ont nourri la passion d’écrire qui m’anime. Je ne vous remercierai jamais assez de votre confiance et de votre enthousiasme.

Je ne mentirai pas : l’écriture de ce troisième tome a été sportive. D’une part, j’avais hâte d’écrire ce tome, car Dariane me trottait dans la tête depuis Le crépuscule violet, mais aussi parce que d’autres projets se bousculent dans ma tête. Donc j’avais hâte de l’écrire, mais aussi hâte d’avoir fini de l’écrire! Oh le paradoxe… Car ce projet a pris plus de temps que prévu à écrire, et il a dépassé mes attentes en terme de longueur : il y avait beaucoup de personnages à qui rendre justice, notamment ceux des deux premiers tomes, en plus de la relation complexe entre la précieuse et son maître d’armes.

Comme vous l’avez peut-être remarqué dans les deux premiers tomes, Dariane est – comment dire – exigente envers elle-même aussi bien que les autres. Et elle ne m’a pas épargné! Pour ceux qui me connaissent un tant soit peu, vous savez à quel point j’affectionne mon planning. J’ai dû bousculer et repousser certains délais. Alors bon, il n’y a pas mort d’homme, si ce n’est mon côté discipliné qui en a bavé. Mais j’aime Dariane de tout mon coeur et elle méritait que je lui rende justice.

Voici pour votre plus grand plaisir, et pour vous faire patienter jusqu’au 22 septembre, un extrait du roman Le zénith nacré.


Brenlir
La salle était bondée à mon arrivée. Nous en aurions pour des heures à traiter toutes ces requêtes. Je m’efforçai de sourire tandis que je saluais d’un signe de tête les visages familiers. Dame Morwen et Dariane discutaient sur le dais, leurs voix trop basses pour que je distingue les paroles.

Les deux femmes n’auraient pas pu être plus différentes. La seigneuresse possédait une chevelure épaisse et d’un roux semblable aux flammes, un contraste intéressant avec la pâleur de sa peau. La précieuse quant à elle arborait de longs cheveux lisses dont la couleur rappelait le bois brûlé ; le brun dominait au travers de mèches allant du doré au noir. Ses yeux étaient d’un bleu aussi éclatant que certains bijoux turquoise de dame Morwen. Je m’approchai des deux femmes et les saluai d’une rapide courbette. Le visage de la seigneuresse se fendit d’un sourire et elle posa une main sur mon bras.

– Je suis contente que tu aies pu te libérer.

Elle inclina subtilement la tête pour indiquer le côté de la salle où le sénéchal Gaur se tenait les bras croisés.

– Bien sûr, répondis-je. Le nombre de pétitions semble élevé, même pour un début de festival.

Le pincement de lèvres de Dariane me fit hausser un sourcil. Elle se reprit aussi vite et m’offrit une expression sereine. Un doute s’insinua en moi. Savait-elle quelque chose qui nous échappait? J’avais beau tourner la question sous tous les angles, j’étais incapable de trouver une cause pour cette soudaine affluence. L’intendant Banut s’avança au milieu de la salle avant que je puisse l’interroger. Il martela le sol de son sceptre cérémoniel pour intimer le silence. Dame Morwen gagna son siège et je fis de même.

À gauche du dais, le maître archiviste chuchotait à l’oreille d’une apprentie. Je fouillai ma mémoire pour me rappeler le nom de la jeune femme. Elle était arrivée quelques semaines plus tôt sous la recommandation du seigneur du château Violet. Sanika. Elle relâcha son souffle et se frictionna les paumes avant de s’atteler à transcrire les échanges du jour. Ce petit geste était le seul signe trahissant sa nervosité, car sa main était sûre tandis que la plume courait sur le parchemin. Tant mieux pour elle; elle irait loin avec un tel aplomb.

Le premier demandeur s’avança et expliqua le terrible glissement de terrain qui avait emporté une partie de sa ferme. Dame Morwen eut tôt fait de dispenser une somme pour le dédommager et je promis d’envoyer une escouade de simarg pour évaluer les besoins des autres hameaux aux alentours. La pétition suivante concernait une querelle entre marchands du port à la suite d’un accident naval, et dame Morwen dut trancher pour offrir une solution équitable.

À la demande suivante, le sénéchal Gaur s’avança, le pli de sa bouche témoignant de son mépris. Dès qu’il eut la parole, il se lança dans une énumération de reproches et d’affronts, menant vers la conclusion logique que nous lui devions une nouvelle tour de guet. Je me levai de ma chaise avec une expression sévère : son mouvement de recul fut instinctif. Je ne prenais aucun plaisir à intimider les gens, mais les petits tyrans ne comprenaient rien d’autre que la force ou la menace. Je mettais un point d’honneur à agir avec dignité, car c’est ce qu’on attendait d’un bon maître d’armes, mais pas au point de négliger les atouts que la nature m’avait fournis.

– La dernière attaque sur le cadran Est remonte à plusieurs années, contrai-je. Une tour a d’ailleurs été installée près de Morrenlast. Les rapports de nos troupes ne sont qu’une formalité puisqu’il ne s’y passe jamais rien. À l’opposé, Bulenport rapporte des incidents de plus en plus fréquents. La sécurité de nos gens est notre priorité et c’est ce qui dicte la répartition de nos ressources. En tant que sénéchal du quatrième bourg en importance, je suis sûr que vous comprenez.

Les mâchoires du sénéchal Gaur se crispèrent au rappel de son rang. Je penchai la tête avec un regard inquisiteur pour l’inciter à réagir, mais il se contenta de hocher la tête avant de s’éloigner. Les yeux de la scribe croisèrent les miens et j’y vis une lueur amusée avant qu’elle ne reporte son attention sur sa transcription.

Je repris ma place et ne manquai pas de remarquer les poings serrés de Dariane. Un observateur peu habitué ne l’aurait pas relevé, car elle exerçait une discipline de fer sur ses propres réactions, mais ses traits étaient tirés et son teint moins éclatant. Je repassai les derniers échanges dans l’espoir de trouver un lien entre son trouble et les requêtes, mais rien ne me sautait aux yeux.

Tandis que les pétitions poursuivaient leur cours, je dressai le bilan de leur nature. La malchance semblait affliger bon nombre de nos citoyens. À première vue, aucune cause commune ne pouvait être attribuée à cette variété de problèmes, mais quelque chose clochait. Quelque chose d’assez sérieux pour affecter la précieuse.

L’intendant annonça une pause, et je rejoignis dame Morwen ainsi que Dariane dans le petit salon attenant. La seigneuresse soupira et s’étendit sur une méridienne.

– C’est sans fin. Je sais que je me répète, mais j’ai l’impression que chaque année, la liste de demandeurs s’allonge.

Dariane s’éloigna pour regarder par une fenêtre plutôt que de lui répondre. Les rayons du soleil caressaient son visage et mes yeux suivirent la courbe délicate de son cou. Je pouvais m’imaginer écarter le tissu de sa robe pour explorer le contour de son épaule. L’idée du contact satiné de sa peau était suffisante pour qu’un chatouillement envahisse mes doigts.

Sauf qu’elle n’accueillerait jamais ce contact avec autre chose qu’un refus glacial. Un mélange de regret et de résignation tourbillonna dans ma poitrine. Je repoussai mon attraction pour me concentrer sur ce que je pouvais faire pour elle. Pour nous tous. Je m’éclaircis la gorge, disciplinant mon attention sur les audiences du jour et leurs causes probables.

– Peut-être que certaines racines du joyau se sont mises à diverger. Ça pourrait expliquer une hausse des problèmes recensés par les bourgs les plus éloignés.

Dariane pivota aussitôt vers moi avec un regard courroucé.

– Bien sûr que non. Tu devrais le savoir : les racines ont encore étendu leur portée cette année.

Je retins une grimace d’excuse à son accusation. J’aurais effectivement dû le savoir, et c’était une des choses que j’avais la ferme intention de rectifier. Si la magie refusait de coopérer pour me permettre de jouer pleinement mon rôle de maître d’armes, j’allais trouver un autre moyen, ne serait-ce que par mon acharnement à résoudre les problèmes un par un. Dame Morwen se redressa sur un coude, le regard fixé sur la précieuse avec un froncement de sourcils.

– En sommes-nous certains?

La précieuse se tourna vers elle, incrédule qu’elle fasse écho à mes paroles.

– Une poignée de pétitions ne suffisent pas à affecter le joyau, répondit-elle avec fermeté.

– De toute évidence, dit la seigneuresse en agitant une main désinvolte. Il n’empêche que nous devrions revoir la répartition des bourgs et leur développement. Je pense que nous n’avons pas été assez stratégiques, et nous en subissons aujourd’hui les conséquences.

Dariane acquiesça avec une légère génuflexion.

– Comme il plaira à ma dame.

Le coin des yeux de dame Morwen se plissa devant la formalité de cette réponse. Je pouvais compatir, car cette froideur m’avait transpercé le cœur plus d’une fois, surtout au cours des dernières années. Avec les enfants et les simargs, elle faisait preuve d’une douceur qui disparaissait lorsqu’elle interagissait avec le reste de son entourage.

Une série de petits coups à la porte m’empêcha de tester son stoïcisme pour creuser ce qu’il cachait. La tête de l’intendant Banut apparut dans l’ouverture, son teint crayeux. Ses yeux écarquillés laissaient présager le pire.

– Mesdames, messire, une délégation vient tout juste d’arriver.

Un soupir échappa à dame Morwen et elle se remit sur pieds.

– Faut-il les faire patienter ou a-t-on déjà passé toutes les demandes importantes?

Le regard de Banut glissa vers Dariane puis revint vers la seigneuresse.

– Je ne crois pas qu’on puisse les faire attendre.

Je retins mon propre soupir à l’idée que les procédures du jour s’éternisaient. J’avais promis à mes enfants de jeter un coup d’œil à leur plus récent projet : leur instituteur s’était lancé dans l’enseignement du travail du bois. Jana avait décidé de façonner un bâton de marche (que je soupçonnais d’être en réalité un bâton de combat) tandis que Vyn avait mis la main sur les plans de fabrication d’une flûte. Mon cœur se serra à l’idée de leur déception, car mes obligations me retenaient souvent loin d’eux. Avec un peu de chance, j’aurais le temps de passer les voir avant le repas du soir.

Le bruit des conversations dans la salle d’audience nous parvenait par la porte entrouverte et les courants d’agitation me firent porter la main au pommeau de mon épée par réflexe. Fidèle à son habitude, la chaleur de l’éclat du joyau imprégna mes doigts. C’était le seul moment où j’arrivais à interagir avec ce dernier : grâce à un contact direct. Je poussai ma conscience dans l’énergie chatoyante pour percevoir les nouveaux venus. Mes sourcils se haussèrent de surprise. La journée allait prendre une tournure bien différente.

– Allons-y.

Banut recula pour nous laisser franchir la porte et je passai le premier. L’exclamation étouffée de dame Morwen témoigna de sa consternation : elle savait que cette brèche protocolaire signifiait un danger potentiel. L’énergie du joyau tourbillonna entre nous comme l’inquiétude de Dariane se mêlait à celle de la seigneuresse.

Arrivé sur le dais, je pus étudier les membres de la délégation en question. Les trois premiers individus avaient le teint basané des gens du Sud, et leurs vêtements bigarrés les identifiaient comme des caravaniers. Deux d’entre eux portaient l’épée tandis que le troisième arborait une cithare passée en bandoulière. Son visage m’était familier et un souvenir me revint; le ménestrel avait séjourné au château, mais son départ datait d’avant mon entrée en fonction en tant que maître d’armes. Vu notre différence d’âge, nous n’avions pas fréquenté les mêmes cercles, d’autant que ma carrière militaire avait accaparé tout mon temps, mais il avait été fort apprécié par les habitants du château à l’époque où sa musique animait les soirées.

Les trois autres individus présentaient de loin le tableau le plus intéressant. Leur chevelure était aussi noire que la nuit et leurs yeux partageaient la même teinte ambrée que le miel.

Des Sylphes.

Mon regard parcourait encore leur groupe lorsque j’entendis Dariane ravaler son air. Un coup d’oeil me suffit pour confirmer qu’elle était livide. L’émotion subjacente était toutefois plus près de la détresse que de la colère. Mes doigts se crispèrent pour résister à l’envie de la rassurer. Dame Morwen prit conscience du problème au même moment et elle passa son bras dans celui de la précieuse, feignant de se raccrocher alors qu’elle offrait plutôt du soutien à cette dernière. Je relâchai mon souffle, soulagé de savoir Dariane épaulée. Devant nous, les expressions des Sylphes s’assombrirent, mais ils ne modifièrent pas leur posture pour autant.

L’intendant claqua le sol de son bâton pour faire taire les murmures qui couraient autour de la salle. Les deux hommes armés d’épée eurent un mouvement de recul, sans toutefois toucher à leurs armes. La situation était alarmante, mais pas encore catastrophique. Une fois le silence revenu, Banut prit la parole.

– Le château Nacré accueille pour la première fois en… 260 ans… une délégation sylphe. Je vous présente la consule Syviis, accompagnée de ses conseillers Rowara et Somir. Ils sont en compagnie des, euh, caravaniers Jabal et Rauk ainsi que de Luan le ménestrel.

Derrière moi, Dariane inspira de façon audible. Je n’osais pas me tourner pour observer sa réaction, car la consule s’avança, bras tendus. Dans ses mains reposait un large morceau de tissu blanc replié plusieurs fois pour former un épais triangle.

– Je vous offre cette étoffe vierge en signe de notre bonne volonté. Puissiez-vous lui donner la teinte de vos désirs.

Je retins le sourire qui voulait étirer mes lèvres. C’était bien joué de la part des Sylphes. Luan ou un des caravaniers devait les avoir informés de la symbolique de ce geste. Il fallait remonter à un événement historique où des pilleurs du Sud avaient causé énormément de ravage sur nos côtes. Pour cesser le cercle vicieux des représailles, un de nos défunts seigneurs avait utilisé cette offrande de paix. Il aurait été mal venu de notre part de les rabrouer devant une telle initiative.

Dame Morwen descendit les marches du dais pour rejoindre la consule. J’avançai un pied, les genoux légèrement fléchis, prêt à intervenir si la situation devait tourner au vinaigre. Elle inclina la tête avec déférence et accepta l’étoffe.

– Je suis honorée par votre visite, mais j’avoue que vos motifs me laissent perplexe. Après la signature de la reddition, votre peuple a concédé qu’il ne se mêlerait plus jamais des affaires des Hommes de sang.

Le ménestrel s’avança et exécuta une courbette digne des courtisans les plus expérimentés. Son regard pétillait tandis qu’il nous étudiait à tour de rôle.

– Mesdames, messire, si vous me permettez, je voudrais vous présenter mes compagnons en bonne et due forme.

Ses mains virevoltèrent tandis qu’il reculait pour désigner la consule. Ses gestes étaient habiles et gracieux. Cette agilité devant se traduire au combat, car je n’avais pas manqué de remarquer le couteau qui pendait à sa ceinture. Trop long pour faire à manger, trop court pour attirer l’attention des gardes. Je rectifierais cette erreur auprès des soldats à la prochaine rotation. Le ménestrel posa une main sur son cœur et se lança :

– Devant vous se tient l’héritière d’une nation de cendre, celle dont le nom est passé de Rancœur à Compassion. Ma belle dame a regardé son peuple toucher le fond de l’abîme et elle a passé chaque jour à gravir la pente qui la mènerait vers l’éclat du soleil.

La belle dame en question lança un regard d’avertissement au ménestrel, mais ce dernier n’en fit pas de cas. Il se tourna vers nous, les bras écartés.

– Un jour, elle a entendu un appel. C’était une perche tendue par de lointains compatriotes; des exilés, des mal-aimés. Elle a risqué sa sécurité pour s’enquérir de leur demande. Se faisant, elle a découvert un scénario bien plus sinistre; celui d’un équipage en mal de survivre. Non seulement elle a accordé sa sagesse à ses frères et sœurs de chair, mais elle est venue en aide à un précieux.

Des exclamations surprises traversent la salle, les spectateurs sous le charme de son envolée lyrique. Les plis au coin de la bouche de la Sylphe laissaient toutefois penser que le ménestrel embellissait une partie de l’histoire. Dariane était immobile, semblable aux statues de jardin. Luan pivota sur lui-même pour s’adresser à la foule.

– Un précieux cher au cœur de notre douce Dariane.

Je pinçai les lèvres à la certitude qu’il était délirant. Personne n’aurait utilisé ce mot pour décrire la précieuse. Elle était magnifique, mais comme l’est un paysage montagneux à l’horizon : grandiose, mais distant. Le ménestrel reprit, les mains en coupe autour d’une offrande imaginaire.

– Les Sylphes qui se tiennent devant vous aujourd’hui ont participé à la bataille pour délivrer le château Carmin.

Des négations s’élevèrent de la foule, mais il semblait s’y attendre, car il pointa les gens assemblés du doigt.

– Trop occupés à veiller sur vos terres, vous avez perdu de vue la tragédie qui se déroulait « au bout du chemin ». Car la comptine le présente si bien; le château Carmin est isolé de ses pairs. D’immondes créatures ont profité de cet éloignement et ont semé le chaos et la destruction sur ses terres.

– En voilà assez!
La voix de Dariane fit sursauter toute la salle. Les regards se posèrent sur elle et le rouge lui monta aux joues. Elle qui était toujours en contrôle, voilà qui tranchait. J’avançai vers elle, prêt à intervenir. Même si la délégation n’avait rien fait, mon inconfort allait grandissant devant le trouble de Dariane. J’aurais voulu lui épargner la tourmente causée par cette rencontre difficile, bien que mon rôle fût de défendre le château et non le cœur de sa précieuse. Mon mouvement dut la rappeler à l’ordre, car elle se redressa et ses mains lissèrent l’étoffe de sa robe. Son agitation était palpable, mais elle s’efforça de sourire.

– J’ai été en communication avec Caysen, et la situation n’a rien d’aussi catastrophique. Un nouveau seigneur a pris le relais et il est appuyé par une maître d’armes compétente originaire du château Bleu. La situation est maîtrisée.

– L’est-elle vraiment? lança le ménestrel avec désinvolture. Pardonnez-moi, ma dame, mais les créatures ont simplement été mises en déroute. Tout porte à croire qu’elles marchent en direction de vos terres, quelques heures à peine derrière nous. Nous sommes, hélas, les messagers d’un avenir funeste si vous n’intervenez pas au plus vite.

Il tendit un épais parchemin fermé par un sceau de cire. Vu la colère dans les yeux de Dariane, je m’empressai de descendre du dais pour intercepter le document, damant le pion au maître archiviste. Je brisai le sceau et déroulai le parchemin. Maître Ofor me fusilla du regard, les mains crispées sur sa table de travail. Il aurait probablement bondi hors de sa chaise s’il n’avait pas été aussi avancé en âge. L’intensité de la réaction de Dariane me poussait à essayer de comprendre la situation pour identifier et résoudre le problème sans délai.

Mon regard parcourut le texte et j’y vis la confirmation des propos de Dariane quant au nouveau triumvirat en place. La menace était dépeinte comme inexorable et maligne : maître Maelora nous exhortait à passer à l’action. Je remontai les marches du dais et tendis la missive à dame Morwen. Dariane fulminait à ses côtés, mais sa colère était un prix que j’étais prêt à payer pour sauver notre château. Même si mon affection pour elle teintait chacun de mes gestes, c’était mon ultime mission et elle ne verrait jamais d’un bon œil que je la néglige. Je pointai la missive et parlai assez fort pour que toute la salle m’entende.

– Le message de la nouvelle maître d’armes est alarmant et mérite toute notre considération.

Dariane se pencha vers moi et parla tout bas, les dents serrées.

– La menace a déjà été discutée avec Caysen et je l’ai jugée mineure.

Je haussai un sourcil et avançai jusqu’à me retrouver assez prêt pour qu’elle doive lever les yeux.

– Je suis le maître d’armes du château Nacré et il m’incombe d’évaluer le danger posé par une telle menace.

Elle serra les poings et s’empressa de les cacher sous ses longues manches. Mon cœur se serra devant sa frutration. Ma seule consolation était de savoir que j’agissais pour le bien de nos gens. Dame Morwen releva des yeux troublés de sa lecture.

– Voilà qui jette un éclairage tout autre sur la situation à l’ouest. Maître Brenlir, vous avez côtoyé maître Maelora par le passé. Quelle est votre impression quant à son sérieux?

– C’est la digne fille de son père, le maître d’armes Vylok, répondis-je. En tant que perle du château Bleu, elle a toujours fait preuve d’un sérieux et d’une discipline irréprochables. Son message est à prendre avec le plus grand sérieux.

La seigneuresse hocha la tête puis se tourna vers les Sylphes.

– Nous acceptons votre offre de paix et nous accueillons votre délégation en nos murs.

Publié par Mélanie

Mélanie Dufresne est une auteur émergente de science-fiction et de fantastique. habite à Québec avec son conjoint et ses deux enfants. Entre la vie de famille et le travail, elle aime bien lire et faire de la randonnée.

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